jeudi 22 novembre 2012

Surveillant

Depuis la rentrée scolaire, je suis surveillant dans un petit collège de campagne de 520 élèves. Pour la première fois de ma vie je me lève le matin pour faire un job que je n'ai pas choisi par défaut. J'aime à nouveau travailler et ça fait bizarre. C'est une sensation que j'avais oublié. J'aime le contact avec les ados. Je kiffe ce travail.

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Le centre Bretagne n'est pas considéré comme la région la plus chaude. On pourrait même penser que c'est un coin bien tranquilou pour planqués. D'ailleurs lors de la rentrée du personnel, notre nouvelle principale (qui a passé 20 ans dans l'académie de Créteil) nous avouait à demi-mot qu'elle se sentait presque en vacances dans nos charmantes contrées...
...Mais mal lui en a pris. Ici il faut gérer tout un tas de cas particuliers et une floppée de gamins paumés, je n'aurais d'ailleurs jamais pensé qu'il puisse y en avoir autant... Un lieu si tranquille implique aussi certains inconvénients et particularismes. Ici on est loin des villes, on est loin de la mer, on est loin du paysage de carte postale que l'on garde parfois de la Bretagne. Le bassin d'emplois est composé d'industries agro-alimentaires et d'exploitations agricoles. Certains gamins n'ont pas vu grand chose dans leurs vies à part des vaches et des champs. Pour eux, le collège est sans doute le seul contact qu'ils ont avec le savoir. Car il faut avouer c'est un peu la misère culturelle dans le coin. A la vie scolaire on est amené à connaître des contextes familiaux bien particuliers et on doit agir en conséquence. Il y a des gosses dont les parents n'ont pas le permis de conduire et qui se morfondent. D'autres sont en familles d'accueil et ne voient que rarement leurs vraies familles. D'autres vivent dans un climat familial pourri par la violence qu'elle soit physique, verbale ou sociale. Certains gosses ont le droit d'en avoir marre. Tu t'en rends compte par exemple quand les familles du père et de la mère se donnent rendez-vous devant les grilles du collège pour se foutre sur la gueule.
Et puis il y a ceux qui d'après ma boss sont de plus en plus nombreux: ceux qui ont un "handicap social". Ces gamins aux profils similaires sont à l'origine de beaucoup de conflits. Ils sont centrés exclusivement sur eux-mêmes, se parlent tous seuls, se tapent dessus, ils n'ont aucune notion de l'autorité, ils mangent du papier pour que tous les regards soient centrés sur eux. Ils foutent les boules.


  

  Je ne le cache pas: j'ai des chouchous. Robin en fait partie. Il me colle toujours. Il parle de tout et il s'intéresse à tout. C'est un des élèves les plus populaires. Robin a une bonne bouille,l'oeil malicieux, il est extrêmement sociable. Tout le monde l'adore. Même les profs... malgré le fait qu'ils s'arrachent les cheveux sur son cas. En classe il est insupportable d'inattention et de dissipation. Il flirte dangereusement avec la commission de discipline. Quant à ses notes elles sont catastrophiques. L'idée qu'il était peut-être surdoué a éffleuré l'esprit de certains. Les tests ont montré que non. Je suis persuadé que c'est un artiste qui n'a pas encore trouvé sa voie. J'espère qu'il la trouvera.
Il y en a aussi Mathieu: un gamin génial pendant 90% du temps. Une tête rigolote, un rire communicatif, il aime étudier et est toujours demandeur pour qu'on l'aide à faire ses devoirs. Mais il arrive qu'il se métamorphose et fasse des crises de nerfs. Ses yeux changent, il se sent persécuté par le monde entier et cogne sur tout ce qui bouge. Il faut empécher le pire, le raisonner, lui parler encore et toujours tout en ayant l'impression qu'on se heurte à un mur. Je sais pertinemment que cela finira mal. Je pense même qu'un jour je prendrais sans doute un ou deux gnons dans la tronche. Et je ne serais même pas capable de demander une sanction contre lui. Il grandit dans la violence, chez lui c'est la zone. Il parait même que sa mère est capable de venir faire sa loi dans la cour du collège. Elle a déjà fait ça l'an passé et elle le refera sans doute. La tempête arrivera un jour.

Il faut aussi gérer cette putain de période qu'est l'adolescence. Cette époque où leurs hormones les rendent débiles et les poussent à faire n'importe quoi. Mythomanie extrême, bastons, trafic de clopes, d'alcool, simulation d'une sodomie sur une élève de 6ème... On a eu droit à tout ça depuis 2 mois. Ces gosses sont odieux et vachards entre eux. Celui qui est différent de la masse: le fameux "bolos" en prend plein la gueule. Les populaires en haut de la hiérachie sociale de la cour du collège veulent tout se permettre, ils se croient "intouchables". Il arrive même parfois que les victimes de leur folie des grandeurs soient les profs. Et cela peut aller très loin. Les rumeurs sont constantes dans la cour et une foi les grilles du collège fermées, elle se poursuivent sur internet. Le summum a été atteind lorsque la "princesse" du collège a accusé son prof de physique d'être un pervers qui la suivait jusque chez elle. S'en suivit une semaine de psychodrame. Des accusations maintenues devant les flics. Un prof ravagé. Des élèves en furie. Des rumeurs surgissants de partout... Et le personnel en plein doute. L'atmosphère était irrespirable jusqu'à ce que le pot aux roses fut découvert... grâce à Facebook. Une bonne âme fit une capture d'écran des aveux, ce qui nous empècha de passer au journal de 20H dans la rubrique "faits divers". La coupable fut renvoyée, le prof fut innocenté mais sa réputation restera salie pour un bon moment. Désormais dans la cour la chasse au traitre est ouverte. Celui qui a osé faire tomber la princesse du collège de son piédestal va devoir payer. Ils vont être sans pitié, vont vouloir le tailler en pièces et se disputer les restes...


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Tu te crois courageux? Et bien essaye de te coltiner ces gamins! Ils ne rèvent que de voir le monde brûler...

vendredi 16 novembre 2012

Tamara Drewe

MARIVAUDAGES EN CAMPAGNE ANGLAISE.

2010. Stephen Frearsavec Gemma Arterton, Roger Alam, Bill Camp, Dominic Cooper.

Avec son nez refait, ses jambes interminables, son job dans la presse people, ses aspirations à la célébrité et sa facilité à briser les coeurs, Tamara Drewe est l'Amazone londonienne du XXIe siècle. Son retour au village où vécut sa mère est un choc pour la petite communauté qui y prospère en paix. Hommes et femmes, bobos et ruraux, auteur de best-sellers, universitaire frustré, rock star au rancart ou fils du pays, tous sont attirés par Tamara dont la beauté pyromane et les divagations amoureuses éveillent d'obscures passions et vont provoquer un enchaînement de circonstances aussi absurdes que poignantes.


Parfois on tombe sur un petit coup de coeur dont on ne comprend pas comment il nous avait échappé jusque là. On découvre de manière inattendue un petit bonbon acidulé que l'on a envie de croquer comme les fesses de Tamara dans son mini-short (...hum je m'égare... mais quand même: mate un peu!) Gemma Arterton est craquante. Cette fille est mille fois plus canon que la pouffe siliconée Jessica Simpson dans "Shérif..." Car là où je veux en venir en disant ça, c'est que la vraie Daisy Duke contemporaine: et bien c'est Gemma/Tamara quoi! Y'a pas de doutes! Bref... arrêtons de comparer ce qui n'est pas comparable, arrêtons de comparer les navets avec les bombecs.

Donc hier j'ai vu Tamara Drewe, une comédie de moeurs adaptée d'un roman graphique de Posy Simmonds. Un joli petit film piquant à la finesse et à la subtilité so british. L'idiot que je suis avait ce bijou depuis des semaines dans son disque dur. Pourquoi ne l'ai-je pas visionné avant ? ça m'aurait pourtant évité quelques petits coups de blues... Car je me suis sentie chez moi en regardant ce film. Je me suis sentie dans un environnement familier et apaisant. Le film a pour cadre une maison d'écrivains dans la campagne anglaise qui va sombrer dans le chaos avec le retour d'une jeune journaliste du voisinage. Ceux que j'appelle les "bobos bouseux" et les intrigues d'un petit village forment en plus une atmosphère que je ne connais que trop bien.

J'ai un goût prononcé pour les ingénues provocatrices, ces reines du village que l'on regarde avec envie ou jalousie. J'aime les écrivains-séducteurs en carton qui passent pour des sommités dans leur milieu restreint. J'aime les rock-stars losers, benêts et snobs. J'aime les ragots qui circulent vite au sein d'une micro-société (et puis les histoires de coucheries, ça met toujours du piment quand on s'emmerde dans un village). Les pisseuses de 15 ans m'ont toujours fait rigoler: ces groupies admirant les paillettes, en décalage total avec leur environnement campagnard dans lequel elles se morfondent. J'aime aussi l'honnête homme un peu frustré mais qui tient à couper son bois droit dans ses bottes. J'aime les glandeurs paumés mais qui retrouvent l'inspiration au contact de la nature, en fantasmant sur la crémière. J'aime les vaches aussi. Je kiffe les waches.


  Les personnages sont attachants. Plusieurs formes de comiques sont réunies et le scénario est bien ficelé. Tout cela forme un petit univers dans lequel on se complaît. On regarde "Tamara Drew" comme un bon vaudeville de boulevard. On en ressort enjoué. Une véritable friandise, je vous disais.